Il arrive qu’on se remémoreautant de la musique d’un film que de son intrigue ou de la prestation des comédiens.
Qui n’a pas siffloter les airs d’Ennio Morricone ou chez nous ceux d’Ahmed Malek? «Une musique a toute son importance dans un film et doit bénéficier de toute l’attention du réalisateur et du producteur», a rappelé le jeune compositeur Younes Bahri, lors d’une conférence organisée, jeudi dernier, par l’Aarc à Dar Abdelltif, (Alger). Il a présenté un exposé et projeté des images pour rappeler la lente évolution de la place de la musique depuis le cinéma muet jusqu’aux grandes productions d’Hollywood. «Au début, elle remplissait un vide puis est venu le temps où elle accompagnait l’image. Maintenant, elle complète celle-ci», a-t-il expliqué. Autre signe de cette mutation, a-t-il renchéri «naguère on faisait appel au compositeur à la phase montage du film. Ce n’est plus le cas car il est associé à sa conception», Lors de la rencontre dont le principe est d’aller à la découverte des métiers du 7e art, il s’est attardé sur la composition sans laquelle une œuvre demeure incomplète et détaillé le processus de création d’une musique et les règles auxquelles elle doit obéir. Devant les étudiants de l’Institut supérieur des métiers des arts du spectacle et de l’audiovisuel (Ismas) et de l’Institut national d’audiovisuel (INSFP) de Ouled Fayet qui pouvait se compter sur les doigts d’une main celui qui est aussi chef orchestre n’a pas manqué de rappeler des musiques qui ont contribué au succès de certains films comme star Wars où John Williams amorça un tournant. Lors d’un débat, il a placé le compositeur au niveau du réalisateur et du scénariste. Parlant dumétier, il a qualifié celui-ci de créatif. «Letravail d’équipe, la coordination avec les autres parties prenantes de la réalisation lui donnent un côté magique!»,a-t-il lancé. Evoquant le manque de compositeurs de musique de films dans notre pays,Bahri a soutenu que beaucoup pensent qu’il n’est pas possible de faire carrière dans ce domaine au vu de la quasi–inexistence d’un marché de films. «L’inexistence d’une industrie qui fait ce lien entre musique et cinéma complique quand elle ne fait pas avorter toute prétention.» Selon lui, «la musique est sacrifiée comme si elle était secondaire.» Il a déploré aussi le fait que «tout le monde, jusqu’au perchman et chauffeur expose son avis sur la composition sans compter la condescendance de beaucoup de réalisateurs». Bahri est revenu ensuite sur son parcours. «J’ai commencé par la musique instrumentale. Par la suite, un concours de circonstances a permis que mes musiques soient utiliséesdans un produit audiovisuel en Grande-Bretagne. Cela m’a beaucoup aidé», nous a-t-il confié. C’est à partir de là qu’il a commencé à acquérir des connaissances et à se former. Bahri, faut-il le rappeler, a composé les bandes originales de films tels que «Lotfi» d’Ahmed Rachedi), «Commissaire Llob» de Bachir Derrais), «Cœurs sous la cendre»deBachir Sellami). Plus récemment, il a signé également les musiques des séries «Le tunnel» et «Yemma 2». Bahri a orchestré pour l’orchestre symphonique de l’Opéra d’Alger, l’Orchestre régional d’Oran, dirigés par Amine Kouider, et l’orchestre ad-hoc du Salon international de la créativité de l’Onda. Il est multi-instrumentiste, maîtrisant piano, flûtes du monde, luth, mandoline et instruments de percussion. Il a décroché enfin le 3e Prix du concours Ali-Maâchi dans la catégorie «Meilleure œuvre musicale».
Walid Souahi